mercredi 29 juillet 2015

"Feel the curves, don't hug them"

La vallée de la Nubra

Nous sommes partis à 4 avec Gompa notre chauffeur.
Un tout petit monsieur tout ridé et tout maigre qui ne parlait pas trois mots d'anglais mais qui riait tout le temps.
4 personnes dans une genre de van beige à la suspension usée depuis des lustres.
Direction, la vallée de la Nubra.
Pas loin, pas loin, à peine 125 kilomètres de Leh.
6 heures pour se rendre.
Nous y resterons une nuit avant de refaire le trajet en sens inverse.
Avec le passage de plus haut col carossable au monde à 5600 mètres.
Sur une route hallucinante.

Nous sommes au coeur de l'Himalaya, c'est difficile de ne pas trouver le paysage totalement hallucinant.
Tout le temps.
Ici, on n'arrête pas d'halluciner.
Mais, ce qui est le plus hallucinant c'est surtout la route en elle-même.
Sans doute la route la plus débile que j'ai jamais prise de ma vie.
6 heures à se tenir après la poignée ou après le plafond ou après le banc, à faire attention de ne pas se fracturer le crane sur la vitre, à tenter de ne pas rouler sur son voisin et à surtout, surtout, à ne pas trop regarder par en bas.
6 heures à remettre sa vie dans les mains de Gompa et à éviter de se demander à quand remontait le dernier check-up des freins et de la direction.
Au fait, cette route, ce n'est pas une route, c'est une aventure en soi.

Honnêtement, je ne comprends vraiment pas que le gouvernement (ou le je-sais-quoi du Ladakh) n'ait pas décidé de fermer ce passage pour cause de danger pour la sécurité publique.
Ou pour hécatombes trop fréquentes.
Ou pour faire baisser leur ration de morts sur les routes.
Interdire surtout cette route pour les gens qui, comme nous, ne font que l'utiliser pour se ballader et pas pour aller porter des médicaments ou des vivres de première nécessité à une population isolée.

Se ballader!
Faut vraiment aimer la ballade version extrême pour se risquer sur cette voie.
Étroite et cahotante.
Avec des passages inexistants ou presque.
Des torrents à franchir devant lesquels les voitures font la file, hésitantes, avant de s'y risquer une par une.
Des camions à dépasser (enfin que Gompa voulait à tout prix dépasser).
Des rochers en plein milieu.
Des nids de poules titanesques.
Des pelles mécaniques qui refont des segments détruits et derrières lesquelles il faut attendre que la route se fasse.
Des tournants.
Rien que ça des tournants.
Et le klaxon comme unique assurance vie.

Fallait vraiment avoir envie d'aller zieuter du côté de la Nubra pour se taper ça.
Enfin.
Le chemin étant souvent aussi intéressant que la destination.
Je sais que je me souviendrais sans doute plus longtemps de la route que de la vallée voisine.

Et puis, boire un thé à 5600 mètres.
Le meilleur thé du monde entier.
Cardamone et sucre.
Les pieds dans la neige.
Avec cette impression d'observer le monde de haut.
Ça n'a pas de prix.

(...)

La Nubra est surtout réputée pour ses dunes de sables.
Et ses promenades en chameau que l'on peut y faire.
Très grosse attraction pour les touristes indiens.
Très.

Paysage qui différe de ce que nous avions déjà vu.
On sent encore plus l'isolement des quelques maisons ou villages que nous croisons.
Il n'y a personne.
Ou si tellement peu.
C'est à se demander pourquoi il y a une route.

Nous sommes allés nous promener un peu sur les dunes de sables, en arrivant en fin de journée.
Le vent s'est levé.
Ça s'est mis à grinçer sous les dents.

(...)

C'est le lendemain matin que nous avons décidé de faire le tour de chameau.
Touristique, certes, mais c'est pas mal ce que nous sommes finalement.
Des touristes.
Et, il y a pire place pour faire du chameau pour la première fois que la vallée de la Nubra.
Avec l'Himalaya en trame de fond.
Tout de même.

Et...
C'était exactement comme nous pensions que cela serait.
Mais, ce qui était le plus le fun, c'était surtout de voir la face de Gompa, notre chauffeur, sur un chameau.
Comme il nous attendait pendant le tour, nous lui avons proposé (par l'entremise du chamelier qui parlait anglais) de faire la ballade avec nous.
Il a commencé par refuser en riant mais, nous avons insisté.
C'était la première fois de sa vie qu'il faisait la ride, après avoir sans doute vu des tas de touristes la faire devant lui.
Touchant pour vrai, c'était sans doute le plus beau 7$ investi de toute ma vie.
Il a demandé au jeune qui menait les bêtes de nous prendre en photo, a regardé le résultat tout sourire et nous a fait comprendre qu'il aimerait bien avoir le cliché...par l'entremise de l'agence.

Nous sommes restés un peu sur les dunes.
Pour le plaisir du sable chaud sous les pieds.
Avons repris la route en nous gorgeant du paysage fabuleux.
Avons fait un petit arrêt pour visiter un temple avec un immense bouddha qui semblait veiller sur toute la vallée et repris la route vers Leh.
En espérant y arriver entières.
Dans un savant mélange d'auto-tamponneuse et du Goliath façon la Ronde.

Suis certaine que la femme de Gompa allume un lampion tous les matins en espérant le revoir vivant en revenant du travail.

(...)

Départ pour Manali demain.
Deux jours pour s'y rendre.
20 heures de trajet.
Parait que la route est pire.











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